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Purifier l’Église

Religion. François et Benoît XVI veulent tous deux que l’Église se transforme. Si le pape émérite insiste, à sa place, et en tant que théologien, sur l’évolution de la théologie morale, tous deux considèrent que l’absence de Dieu – corollaire de la présence de Satan –, dans nos sociétés contemporaines, est le plus grand danger.

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Purifier l’Église

Voilà qu’est soudainement paru, dans un mensuel confidentiel destiné au clergé bavarois, un long texte de douze pages signé de la main de Benoît XVI, quatre-vingt-douze ans. Paru en allemand, l’article du Klerusblatt a été aussitôt largement traduit et diffusé, et n’a pas manqué – comme on s’en doute – de réveiller les ardeurs querelleuses des camps antagonistes. Quelle mouche avait donc piqué le pape émérite ? À certains observateurs, la publication de ce texte a paru à ce point improbable que, s’intronisant experts graphologues, ils ont aussitôt suspecté on ne sait quelle machination de prélats conservateurs, profitant pour servir leur cause de la faiblesse d’un auguste vieillard prêt à signer tous les chèques qu’on lui présenterait. Le contenu de l’article ne fait toutefois planer aucun doute sur l’identité de son auteur. Rien de moins qu’une urgence exceptionnelle pouvait contraindre le vieux théologien à sortir de sa priante retraite pour se jeter ainsi à nouveau dans l’arène. Rien de moins qu’un grave danger pesant sur l’Église pouvait l’inciter à interrompre un moment le recueillement d’une âme qui se prépare sereinement à retrouver son Créateur.

Benoît XVI aime bien trop cette Église à laquelle il a consacré toute sa vie pour prendre le risque d’allumer la mèche qui ferait partir l’incendie. Plus encore : il a trop longtemps défendu les privilèges du ministère pétrinien pour être tenté de mettre en difficulté, si peu que ce soit, le pape qui lui a succédé. La tonalité même de son article témoigne à l’endroit de François d’une remarquable courtoisie, voire même d’un respect filial. Pas un mot de reproche ne lui est adressé, pas un coup de canif ne lui est lancé fût-ce en passant sous la forme oblique d’une critique dissimulée. Dans la formule qui termine son intervention, il n’y a pas lieu non plus de chercher la moindre duplicité : « Je tiens à remercier le pape François pour tout ce qu’il fait afin de montrer, encore et toujours, la lumière de Dieu, qui n’a pas disparu, même aujourd’hui. Merci Saint-Père ! »

Affaiblir l’autorité, vieille lune progressiste

Manifestement, Benoît XVI n’a pas pris la plume pour tailler des croupières à son successeur. Il l’a fait pour affronter un autre adversaire, qui a trouvé dans le scandale des abus sexuels une occasion chanceuse de se ragaillardir et d’occuper à nouveau le devant de la scène. Dans ces affaires, en effet, d’aucuns voient la preuve évidente d’une crise de l’institution ecclésiale qui, telle qu’elle est, ne fonctionnerait pas correctement et aurait donc impérativement besoin d’être réformée. Cette tendance obstinée à vouloir changer l’Église en substituant une horizontalité démocratique à l’autorité verticale du magistère est une vieille lune progressiste. Mais force est de constater que cette velléité réformatrice avait été quelque peu refroidie sous le pontificat de Jean-Paul II. Aujourd’hui, elle est de nouveau pimpante et trépigne d’impatience.

C’est contre ce danger que Benoît XVI ferraille dans l’article du Klerusblatt, en rappelant que « susciter une autre Église […] est quelque chose qui a déjà été expérimenté et qui a échoué ». Si l’on considère que la réforme protestante a été une expérimentation de ce genre, alors l’intervention inopinée du pape émérite s’explique d’autant mieux. Car la situation est grave. Et cela d’autant plus que les promoteurs de telles réformes s’autorisent de François lui-même, dont ils déplorent cependant que la dénonciation du cléricalisme ne soit pas suivie d’effets et dont les promesses de collégialité n’aboutissent pas encore, selon eux, à suffisamment d’autonomie. Ils placent leur espérance en François, mais il est vrai aussi que François les déçoit régulièrement. Le même qui déclarait « qui suis-je pour juger ? » est capable, à leur dépit, d’affirmer que l’homosexualité au sein de l’Église pose un véritable problème. Alors que penser ?

Une Église ouverte jusqu’à être contaminée

Sans doute sont-ils déçus parce qu’ils présupposent que François est beaucoup plus progressiste qu’il ne l’est réellement. Le discours de clôture que le souverain pontife a tenu lors du sommet de février 2019 sur les abus sexuels est à ce titre très instructif. Il a déçu, et pour cause, tous ceux qui attendaient l’annonce de mesures fracassantes et de chambardements institutionnels. Tout à l’inverse, le propos tenu par François à cette occasion n’était pas sans ressemblance avec la position adoptée par Benoît XVI dans son texte. Cela est particulièrement évident dans ce fait, d’abord, que l’un comme l’autre refusent obstinément de considérer que le problème de la pédophilie serait un problème intrinsèque à l’Église ou qui prendrait sa source en elle. Elle prend son origine, affirme Benoît XVI, dans le mouvement de libéralisation sexuelle qui, au tournant des années soixante, a ouvert largement la porte à toutes les expérimentations, en allant même jusqu’à accorder une certaine respectabilité à la pédophilie. Pour François comme pour Benoît XVI, c’est bien plutôt dans la mesure où l’Église serait en quelque sorte trop ouverte sur le monde qu’elle en épouse les travers et en partage les dérives. Rien ne justifie donc qu’on impute à l’organisation ecclésiale comme telle, en s’empressant d’imposer des réformes structurelles, la responsabilité de crimes qu’elle a commis par contamination.

À cette première cause, le pape émérite ajoute, il est vrai, un autre élément d’explication qui pourrait être un motif de friction avec François : « À la même époque, indépendamment de cette évolution, la théologie morale catholique a connu un effondrement qui a rendu l’Église sans défense face à ces changements dans la société ». Et l’auteur de raconter en détail les âpres querelles théologiques qui ont conduit à la rédaction de l’encyclique Veritatis Splendor, dans laquelle Jean-Paul II rappelait fermement qu’il y a des actes intrinsèquement mauvais, qui ne doivent jamais être tolérés, quelle que soit l’intention de celui qui les commet et les circonstances dans lesquelles il se trouve. De là à voir dans ce rappel une façon de répondre favorablement, sans avoir l’air de le faire, aux dubia provoquées par la publication de l’encyclique Amoris Laetitia, il n’y a qu’un pas allègrement franchi par les plus enthousiastes comme par les plus critiques.

Le refus du magistère moral

Mais ce n’est nullement ce que Benoît XVI avait en tête en rédigeant ces lignes. À ses yeux, l’effondrement de la théologie morale n’est pas tant imputable à ces complexes et délicats tâtonnements théologiques qu’aux dérives auxquelles ces discussions ont trop souvent donné lieu en alimentant un véritable esprit d’insubordination. À la faveur de ces débats, quantité de théologiens en venaient effectivement à remettre en cause la légitimité du Magistère à imposer quoi que ce soit de définitif en ce domaine. Ce qui a posé problème et a entretenu la plus grave confusion morale dans les esprits (au point de ne plus savoir reconnaître le Mal) résidait moins dans les tentatives pour produire une nouvelle théologie morale que dans le refus de se soumettre à un magistère moral de quelque nature qu’il soit. Ce n’est pas pour rien que Benoît XVI fait mention de la déclaration de Cologne, du 5 janvier 1989, dans laquelle quinze théologiens allemands (bientôt rejoints par beaucoup d’autres) mettaient explicitement en cause le magistère de l’Église en réclamant d’avantage d’horizontalité et moins de verticalité. En l’occurrence, il s’agit de montrer à quelles conséquences désastreuses peut aboutir une façon politisée de concevoir l’expression « peuple de Dieu ».

Quant aux mesures annoncées pour résoudre le problème des abus, elles sont tout au plus des mesures pragmatiques bien davantage que des réformes institutionnelles. Telles sont les « best practices » que François emprunte à l’Organisation mondiale de la santé et qui ne vont guère au-delà des mesures déjà entreprises en son temps par le pape Benoît XVI. À la grande déception de ceux qui se promettaient déjà de construire une « nouvelle Église ».

Les catholiques progressistes existent toujours et ils l’affirment avec une pertinence, une foi et une intelligence qui forcent le respect et augurent bien de la “nouvelle Église”.

En fait, la principale mesure, la mesure “choc”, dont les deux papes attendent la purification de l’Église, est taillée exactement aux proportions de ce qui représente pour tous deux la cause fondamentale des abus commis. Sur ce point, l’entente entre les deux pontifes est parfaite, et la déception qu’a pu susciter le discours de clôture de François est rigoureusement de même nature que les critiques adressées aux préconisations de Benoît XVI. À l’un comme à l’autre, on a reproché de se contenter de parler pieusement de Dieu, au lieu d’agir énergiquement par des mesures décisives. Comme si l’Église était une simple institution humaine et non le mystère d’une alliance divine. Comme si le rapport intime à Dieu devait n’être qu’une simple dimension optionnelle, du moins extrinsèque à tous les problèmes d’ordre pratique requérant des solutions pratiques. Comme si la relation à Dieu n’avait rien à voir avec la morale, comme si un crime n’était pas d’abord un péché et ce péché la marque en l’homme de la présence du Diable. Comme si la foi était complètement dissociable d’une orthopraxie, d’une « action droite » qui n’aurait aucunement besoin de puiser en Dieu ni sa direction ni son moteur.

« Comment, demande Benoît XVI, la pédophilie a-t-elle pu atteindre de telles proportions ? En fin de compte, la raison principale réside dans l’absence de Dieu. Nous aussi, chrétiens et prêtres, préférons ne pas parler de Dieu, car ce discours apparaît comme inconfortable. […] L’une des premières tâches qui doivent découler des bouleversements moraux que connaît notre époque, consiste à ce que nous nous remettions à vivre de Dieu et ancrés en Lui. Nous devons avant toute chose réapprendre à reconnaître Dieu comme le fondement de nos vies et non à le laisser de côté comme une parole creuse ». Celui que l’on connaissait surtout comme un théologien talentueux se révèle ici comme un homme profondément habité par la prière, obsédé par le souci de placer continuellement Dieu au centre de son existence, sans faire jamais de Lui un simple « présupposé ».

Le pape François n’a pas une position foncièrement différente. Lui qui, dès son élection, s’est proposé de remettre à genoux les membres de la curie en leur imposant des retraites spirituelles, insiste continuellement sur cette relation vivante à Dieu dans laquelle il voit le nexus de l’existence chrétienne. Ainsi donc, pas de grand chamboulement institutionnel. Ou du moins le seul qui importe vraiment : la conversion intérieure des cœurs, le retour à Dieu, seul viatique authentique du peuple de Dieu.

Par Damien Clerget-Gurnaud

 

Illustration : Les deux papes sur la même longueur d’onde ?

 

 

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