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Gilets Jaunes la violence en question

Les forces de l’ordre ont déployé contre les gilets jaunes une violence qui dépasse ce que nous avons vu en France dans les nombreux épisodes de troubles depuis 25 ans. Désormais il n’est plus aucun ministre de l’Intérieur qui pourra affirmer qu’il ne peut rien faire contre les pillards, caïds et dealers des banlieues et contre l’extrême gauche intrinsèquement violente, Nuit debout ou Zadistes. Car tout se passe comme si la répression pouvait s’exercer contre les Gilets jaunes sans aucune retenue. Pourquoi cela ?

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Gilets Jaunes la violence en question

Serait-ce que, pour les banlieues, le régime ne se sentirait pas menacé ou, pire encore, qu’il verrait dans cette purulence un outil politique finalement utile qu’il entretient à grand frais par la politique de la ville depuis 81 ? Aussi bien les victimes des exactions banlieusardes ont été jusqu’à présent les futurs Gilets jaunes qui votent avec leurs pieds en fuyant les zones de non droit. De même l’extrême gauche serait-elle finalement impuissante à ébranler les assises du pouvoir, tant il est vrai que, de blacks blocs en Nuit debout, les gouvernements successifs ont agi contre eux avec une singulière modération. Fils de 68, les hommes de l’Etat ne sauraient totalement désapprouver la «  révolution » surtout si, pour eux, elle a débouché sur les prébendes, honneurs et gratifications en tout genres dont ils se sont goinfrés sous l’appellation républicaine. La reconnaissance du ventre en quelque sorte.

Gilets jaunes un «  traitement «  particulier

Mais pour les Gilets jaunes c’est autre chose, ils sont le peuple et en dépit d’un discours parfois contradictoire, ce sont les fondements du régime que ce peuple remet en cause. Non seulement parce qu’en tant que peuple il démontre que le pouvoir n’a plus le peuple de son côté et que la majorité électorale n’a pas de légitimité, mais encore parce que le discours des Gilets jaunes remet en cause ce même pouvoir en tant qu’oligarchie ploutocratique.

Et nos politiciens de pousser des cris de vierge effarouchée lorsque la porte d’un ministère est fracturée (qui avait laissé là cet engin, avec ses clefs, qui l’avait conduit là ?) Ou bien encore lorsque le président est décapité en effigie et ceux-là de crier à la république en danger ! Sauf que cette même république a, dans ses prémices fondatrices, la guillotine. Il est assez plaisant de voir ministres, députés, journalistes, adeptes de la subversion et héritiers de 68 se faire les défenseurs de  « l’ordre bourgeois ». Avec un zèle touchant, Marlène Schiappa, en moderne Olympe de Gouges ( guillotinée en novembre 1793 par ses amis), n’a pas de mots assez forts pour proclamer son amour de la république et de ses valeurs, dont elle serait incapable de donner la moindre définition puisqu’elle est un gris-gris, un fétiche qu’il faut brandir pour conjurer le mauvais sort que les  «  factieux » lui font . Bien sur il y a eu, en dehors des casseurs et des pilleurs, des manifestants violents chez les Gilets jaunes mais à la juste mesure de la violence policière, l’une et l’autre n’ayant cessé de progresser au fur et à mesure des épisodes orchestrés par ces derniers. Et toute idée de fraternisation avec les forces de l’ordre, évoquée ça et là sur les ronds points ou les avenues, témoigne d’une grande naïveté de la part de ceux qui ne voyaient pas qu’ils touchaient au cœur même du système, lequel n’entendait évidemment pas laisser la place et se défendait bec et ongles.

Pourquoi le mouton devient t-il enragé ?

Le pouvoir a cru pouvoir agiter le chiffon rouge par des propos qui portaient à incandescence la crise, cela n’a eu pour effet que d’attiser le déchaînement de cette violence. En ce sens Macron et son gouvernement portent une lourde responsabilité dans ce crescendo, en jouant la défense de l’ordre public et en pariant sur l’effet  “antichienlit” qui avait si bien profité à De Gaulle en Juin 68. Las ! Ce n’est pas le cas, les sondages en témoignent, et si les Français sont légitimement inquiets des violences, ils ont néanmoins compris cette chose simple qu’apparemment le gouvernement n’a pas compris : comment et pourquoi un mouton devient-il enragé ? Pourquoi le petit employé, l’artisan, l’aide-soignante, le chauffeur routier, le cadre moyen, les retraités, les femmes si nombreuses dans ces manifestations acceptent-ils de sacrifier leurs week-ends en famille dans le froid et les gaz lacrymogènes, de semaine en semaine ? Pour le seul plaisir de déplaire à l’oligarchie ? Allons donc ! C’est qu’ils n’en peuvent plus de taxes, de normes et de réglementations, de tracasseries administratives et de morgue politique, quand le petit conseiller en clientèle de leur banque abuse de son maigre pouvoir parce qu’ils sont à découvert et ont du mal à boucler leurs fins de mois et qu’ils s’inquiètent pour l’avenir de leurs enfants. Dans un pays qui affiche au fronton de ses monuments l’égalité, c’est le deux poids deux mesures qui rend le mouton enragé : le boxeur de gendarme connaîtra les geôles de la république, tandis que Benalla est en liberté, comme les petits caïds de banlieue qui narguent la maréchaussée. Alors que celle-ci à son actif à l’encontre des Gilets jaunes un nombre très important de blessés éborgnés, mutilés, gazés et arrêtés en nombre comme jamais opposants ne le furent. Une tâche indélébile sur le mandat de Macron. Avec une justice étonnamment prompte, ce qui confirme qu’elle fonctionne à deux vitesses dans le pays, les auteurs de bavures sur les Gilets jaunes et les incendiaires du nouvel an s’en sortent bien. Cette « République » tant invoquée, tant révérée, n’est plus qu’une grotesque pantalonnade.

Georges Sorel et la violence.

Dans l’avant propos de son livre Réflexions sur la violence rédigé au début du XXe siècle, Sorel affirme :  « Qu’il ne faut pas examiner les effets de la violence en partant des résultats immédiats qu’elle peut produire, mais de ses conséquences lointaines ». Ce philosophe et sociologue français, inclassable politiquement, s’inspirait autant de Marx que de Bergson, de Maurras que de Proudhon. Théoricien de la violence, il décrit au tout début du XXe la mise en servitude des syndicats par la loi Waldeck-Rousseau de 1884 : « Transformer les syndicats en associations politico-criminelles servant d’auxiliaires au gouvernement démocratique, tel fut le plan de Waldeck-Rousseau depuis 1884 ; les syndicats devaient jouer un rôle analogue à celui que nous avons vu jouer aux Loges, ceux-ci servant à faire l’espionnage des fonctionnaires ». Un siècle après on ne peut manquer de trouver quelque justesse à ce jugement amplement vérifié aujourd’hui, mais force est de constater que nous sommes devant un vide abyssal de la représentation dans toute ses formes (syndicalisme, députation, presse). Au-dessus de ce vide, un président aveugle sur «  les conséquences lointaines de la violence » et déjà sacrifié politiquement parlant, car Les Dieux ont soif. Une France enfin qui ne devrait pas cesser avant longtemps de connaître la violence.

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