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Les Droites françaises face au national-socialisme

Àtravers des cas exemplaires, du Breton indépendantiste à l’aristocrate nationaliste, on comprend que la droite “révolutionnaire” ralliera les nazis alors que la droite “conservatrice” les combattra.

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Les Droites françaises face au national-socialisme

Quelles ont été les réactions des droites francophones face au national-socialisme ? On trouvera de fort intéressantes réponses dans un ouvrage important – et d’ailleurs plus vaste, puisqu’il interroge à la fois l’espace francophone et l’espace germanophone –, qui vient d’être publié sous la direction d’historiens spécialistes du sujet. De ses trois parties, la troisième, centrée sur les approches allemandes, est rédigé dans cette langue, et la première, concernant les chrétiens-démocrates, ne nous retiendra que pour l’intéressante contribution touchant au journal démocrate-chrétien L’Aube (H. Boivin), initialement favorable à une réconciliation avec l’Allemagne, mais abandonnant cette perspective dès l’arrivée d’Hitler au pouvoir, dénonçant alors les persécutions antisémites, avant de prendre position contre les accords de Munich pour cesser de paraître en juin 1940.

Les analyses qui concernent des francophones classés plus à droite, six individus et un mouvement, permettent de bien saisir la variété de ces droites françaises par la manière dont les thématiques se croisent ou s’opposent en leur sein (nationalisme, revanche ou réconciliation, antisémitisme…) ou par leurs difficultés à appréhender le nouveau mouvement.

Pacifistes, antisémites, conservateurs…

Gustave Hervé (C. Defrance), socialiste avant 1914, est ensuite ainsi avant tout un nationaliste inquiet partisan d’une réconciliation franco-allemande et de la révision du traité de Versailles. « La réconciliation ou la guerre ! s’écrie-t-il – La réconciliation ou le bolchevisme universel ! ». Hitler et son mouvement, en qui il voit simplement un « boulangisme allemand », pourraient être pour lui l’instrument de cette réconciliation, mais deux choses le feront cependant changer d’avis : la première, dès l’origine, est son refus de l’antisémitisme ; la seconde, en 36, sera la remilitarisation de la rive gauche du Rhin. Surveillé par la Gestapo, il mourra en 1944.

Pour les frères Jérôme et Jean Tharaud (M. Leymarie), c’est tout au contraire l’antisémitisme qui va les conduire à regarder favorablement la naissance du troisième Reich. Auteurs de nombreux ouvrages rédigés lors de leurs voyages en Europe, où ils n’omettent jamais d’évoquer « la question juive », il pensent que le national-socialisme peut mettre en place cette législation antisémite dont ils regrettent l’absence en France. Mais ils seront triplement déçus : par l’Allemagne nazie d’abord, par son folklore et sa mystique auxquels ils ne sont guère sensibles ; par la réalité haineuse de ce qu’est l’antisémitisme quand il est mis en œuvre ensuite, réalité que nos écrivains n’avaient jamais appréhendée ; par la France elle-même enfin : ces « conservateurs d’extrême droite répugnent à l’armistice et n’approuvent pas non plus les principes et les valeurs de la “révolution nationale” ». Autant de déceptions qui les conduisent au silence à partir de 1940.

Vibrion politique, Henri de Kérillis (D. Azuelos) pensait aux États-Unis d’Europe pour faire face au bolchevisme et voulait rassembler les républicains de droite contre le cartel des gauches derrière son Centre de propagande des républicains nationaux. Mais il découvre la force révolutionnaire du national-socialisme et estime alors Hitler plus dangereux que Staline, distinguant rapidement entre l’URSS bolchevique honnie et la Russie éternelle éminemment nationaliste, comme le fera plus tard un Charles de Gaulle – avec lequel d’ailleurs il se brouilla. Opposé aux accords de Munich, il s’exila un temps aux États-Unis.

Xavier de Hauteclocque (M. Cornick) dénonçait pour sa part cette Allemagne belliqueuse qui reprenait forme dans les années 30, comme aussi la mystique d’un national-socialisme dans lequel il voyait une nouvelle Réforme. Il s’inquiétait de voir les conservateurs allemands écartés du pouvoir par la violence tandis que le national-socialisme s’insérait dans tous les rouages de la société. Cet aristocrate, qui souhaitait que la France se réforme pour lutter contre l’Allemagne nazie, fut sans doute empoisonné lors d’un séjour outre-Rhin.

Lucien Rebatet (O. Dard), pamphlétaire de qualité et antisémite virulent, « dissident » célèbre de L’Action française – qu’il décrira dans Les Décombres comme « l’inaction française », plaidera dans Je suis partout la cause de cette révolution national-socialiste à laquelle la collaboration devait, selon lui, nécessairement arrimer la France. C’est que le nouveau régime allemand est pour lui, dès 1936-1937, la version allemande d’un fascisme qu’il admire, et que, malgré son vieux fond germanophobe – hérité justement de l’Action française –, il est convaincu que la nouvelle idéologie dépasse la seule résurgence de la vieille Allemagne. Olivier Dard démontre cependant comment ce Munichois – persuadé alors que la France perdrait la guerre si elle devait la déclarer, comme l’Action française encore – reconstruit sa pensée dans Les Décombres pour lui donner une totale cohérence nationale-socialiste. La fin du pacte germano-soviétique et la croisade « contre le bolchevisme » lèvent en tout cas ses derniers doutes : pour lui, la France de 1941 doit suivre l’exemple donné en Italie et en Allemagne et se doter d’un véritable fascisme qui devra être « avec rigueur antioligarchique, antijuif, antiparlementaire, antimaçonnique et anticlérical ». Un « socialisme aryen » auquel ce passionné de musique arrive par une sorte de mystique : « il y a un style hitlérien, mise en scène, musique, décor […] Wagner m’a sans doute expliqué Hitler mieux que tout le reste. » Il sera condamné à la Libération.

L’Allemagne, le bolchévisme ou la France ?

Olier Mordrel (S. Carney), chantre du nationalisme breton, n’hésitait pas pour sa part à réclamer, pendant l’entre-deux-guerres, « de la terre et des colonies pour nourrir [son] peuple ». Sensible à l’esthétique national-socialiste, racialiste (il considère qu’il y a une « super-race nordique dont les Celtes et les Germains sont deux rameaux distincts et d’égale valeur »), il croit que l’Allemagne nationale-socialiste va fonder un ordre nouveau sur une alliance des peuples nordiques. Reprenant le Spengler de Prussianité et socialisme, il oppose à une Allemagne ancestrale qui, malgré tout, lui reste étrangère, le militarisme prussien, ce qui, comme pour d’autres auteurs, le conduira à une fascination pour « l’ordre noir » de la SS. Utilisé par les services secrets allemands, il se réfugiera à l’étranger.

Reste le cas d’un mouvement, L’Action française (M. Grunewald). On sait la profonde détestation maurrassienne pour les brumes allemandes et la manière dont Maurras comme Bainville n’ont cessé de demander, sinon la dislocation, au moins la division des Allemagnes. « La vision du national-socialisme diffusée par L’Action française – écrit Grunewald – reposait sur l’idée que, depuis 1933, on assistait outre-Rhin non pas au développement d’un phénomène inédit, mais au dévoilement progressif d’un visage spécifique de “l’Allemagne éternelle” ». La mystique hitlérienne, tout à fait étrangère à Maurras, dont on connaît la fascination pour l’antiquité gréco-latine et le soleil méditerranéen, c’est pour Léon Daudet le retour de Luther, et ce serait bien toute l’Allemagne qui y communierait, l’analyse de l’A.F. ne tenant pas compte des diverses oppositions allemandes à un national-socialisme censé incarner pleinement l’esprit de cette nation. Le peuple allemand, foncièrement belliqueux, serait donc uni derrière Adolf Hitler, représentant des intérêts économiques et de la caste des junkers – du complexe militaro-industriel allemand en quelque sorte –, et le national-socialisme prolongerait ce renouveau allemand du XIXe siècle qui mena de Fichte à 1870 – et aurait les mêmes effets désastreux pour une France trop insouciante, l’Action française demandant que l’on publie Mein Kampf pour mettre en garde cette dernière.

Bien sûr, la question se pose un temps à l’Action française du national-socialisme comme simple avatar germain du fascisme italien, les royalistes français ayant une approche favorable de ce dernier – le dictateur n’y laissait-il pas en place le roi ? – Plusieurs éléments conduisent cependant le mouvement à clairement distinguer les deux : la « nuit des longs couteaux », sa violence et sa répression d’éléments conservateurs d’une part ; et d’autre part la prise en compte, notamment par Léon Daudet, dès 1935, du fait que le racisme qui est au cœur du national-socialisme ne se limite pas à l’antisémitisme, mais conduira nécessairement à une guerre entre « le germanisme et la latinité ». Dès lors, le mouvement prône d’abord de nouvelles alliances : il s’oppose aux sanctions de la SDN contre l’Italie pour éviter son rapprochement avec l’Allemagne, préconisant au contraire une alliance franco-italienne pour faire barrage au dictateur allemand. Après l’échec de cette tentative, persuadé en 1938 que la France n’est pas prête, il fait le choix des accords de Munich, puis s’oppose à l’entrée en guerre en 1939. Après la défaite, il ne se pose plus guère que la question de la reconstruction nationale qui devrait nécessairement être entreprise derrière le maréchal Pétain, s’inspirant volontiers de Fichte et de ses Discours à la nation allemande. Mais, comme le remarquera avec ironie Rebatet dans Les Décombres, la thèse de la « France seule » sera de peu d’intérêt dans le tourbillon d’une guerre mondiale, et, tandis que l’Axe perd pied, l’Action française se révèlera incapable de renouveler son analyse et soutiendra Pétain jusqu’au bout. Ses membres en paieront le prix.

Au terme de ce parcours, on mesure combien, à partir de nombre d’éléments communs dans leurs visions du monde respectives, ce sont en fait les priorités différentes accordées aux principales questions que suscite alors le national-socialisme, les premières touchant à sa définition même, les secondes à l’attitude politique à adopter à son égard, qui divisent les droites.
On l’a compris, la première question est celle de savoir si ce mouvement est bien entièrement nouveau, ou s’il ne s’agit pas simplement d’une nouvelle mouture, après Arminius et la Réforme, de l’Allemagne éternelle, globalement perçue, sinon comme l’ennemi de toujours, au moins comme un danger permanent pour la civilisation « latine » à laquelle participerait la France. Deuxième question, si c’est bien un élément nouveau, celle de savoir s’il relève plus de principes révolutionnaires ou conservateurs – une question liée à l’approche que l’on peut avoir d’un fascisme installé au pouvoir depuis dix ans. Sans grande surprise, ce sont les auteurs « révolutionnaires » – Rebatet, Mordrel – qui se feront nationaux-socialistes, quand les « conservateurs » – Kérillis, Hauteclocque – s’y refuseront, mais il convient de noter aussi combien le parti-pris d’antisémitisme, largement partagé, interfère dans nombre de ces analyses.

Une fois défini le national-socialisme, vient ensuite la question de l’attitude à adopter sur la scène internationale. Le traumatisme de la Grande Guerre pèse de tout son poids sur la question du rapport à l’Allemagne : méfiance absolue pour les uns, nécessaire réconciliation pour les autres. Vient ensuite la définition de la menace principale : est-ce la menace lointaine, mais idéologiquement bien définie, du bolchevisme, ou celle, plus proche, mais idéologiquement souvent moins bien cernée, du national-socialisme ? L’élément qui viendra ici brouiller au moins partiellement les cartes sera l’appréciation des possibilités militaires françaises, qui conduira d’abord à l’acceptation ou au rejet de l’accord de Munich, puis au choix qui sera fait de suivre la politique de Montoire ou de s’engager à la Résistance. Et ce sera peut-être le seul regret en refermant cet ouvrage que de n’avoir pas eu une étude sur l’un de ces nombreux représentants des droites françaises qui structurèrent la Résistance dès son origine.

Coll. sd. Michel Grunewald, Olivier Dard et Uwe Puschner, Confrontations au national-socialisme en Europe francophone et germanophone, vol. 4 Les droites face au national-socialisme, Bruxelles, Peter Lang, 2020.

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