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L’écrin de nos repentirs

Les églises flamandes sont ravissantes. Surtout celles qui ont été peintes au XVIe et au XVIIe siècles.

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L’écrin de nos repentirs

Dans des espaces dégagés et lumineux, quelques minuscules personnes se promènent. On dirait des salles des pas perdus, vastes antichambres du purgatoire. À peine si un autel, un dais, un retable ou des armoiries en losange (les obiit, blasons funéraires) viennent ponctuer les calmes alignements des pierres, les élans gothiques impeccablement figés, les perspectives démesurées évoquant l’éternité. Tout est contenu et on sent un sacré proche du bourgeois par son calme, sa certitude, sa discrétion, son opulence de bon aloi, son goût pour l’anecdote qu’illustrent de sages saynètes, comme ces enfants jouant sur le dallage.

C’est un collectionneur, anonyme, qui nous offre de contempler sa collection, rassemblée en quarante ans. On ne saura rien de lui sinon qu’il participe de cette lumière diffuse, sans effet dramatique, emplissant tout l’espace, tranquille affirmation d’un divin outrepassant les querelles qui déchirent protestants et catholiques. D’ailleurs, quand Pieter Neefs I peint en 1636 son Intérieur d’une église animé d’une procession, il reprend, dans une architecture imaginaire, une gravure antipapiste dont le message s’est évanoui. Catholiques au sud, protestants au nord, les seconds occupant les églises des premiers, qu’ils ont dévastées (la furie iconoclaste, beeldenstorm, « tempête d’images », a fait rage en 1566, des prêtres étant tués en même temps que statues et tableaux sont détruits).

Côté sud, les tableaux glorifient une paix catholique où les sacrements, sur un mode quotidien, habitent les nefs. Côté nord, les protestants peignent leurs temples dépouillés de tout le superflu catholique. C’est aride. Le commissaire de l’exposition nous dit que « la blancheur des colonnes, l’absence de décor et la présence récurrente du fossoyeur concourent à plus de recueillement et à une plus grande spiritualité. » Hmmm… Non. Le fossoyeur n’est pas plus spirituel que le prêtre, même s’il est au premier plan, fouillant le sol déjà garni de vieux cadavres, et qu’un Hollandais en noir le contemple avec intérêt (Cornelis De Man, Vue sur le balcon de l’orgue de la Vieille Église de Delft). On s’ennuie un peu dans ces temples sévères, on ne vient pas y vivre, comme chez les catholiques, on vient se contempler sous l’œil de Dieu. Le genre glacé triomphe avec Jan van der Vucht et son Intérieur d’une église imaginaire de style Renaissance avec une coupole ouverte qui, pour le coup, ressemble singulièrement à un palais de justice XIXe. La lumière est plus froide, la divinité plus absente ; on est moins dans l’antichambre du purgatoire que dans le grand hall des jugements particuliers, pas très loin de l’enfer. Les perspectives obliques délaissent les grandes trouées des nefs, qui menaient droit à l’autel et au tabernacle (qui ont été enlevés), et révèlent les bas-côtés.

On peut admirer ces perfections privées de chair, magnifiques écrins des blasons funèbres, seules touches vives, mais on ne se sent à l’aise que devant les tableaux où les chiens jouent, où chaque chapelle et chaque pilier proposent une halte médiatrice grâce à leur retable ou leur statue. Hendrick van Steenwijck II, avec son Intérieur d’une cathédrale gothique de 1597, réalise une synthèse des genres : nef centrale, avec un léger décalage qui casse une perspective qui serait sinon trop appuyée, tableaux et maître-autel, belle lumière grise sans être froide, soulignée par un brossage oblique, rien de trop aimable dans les saynètes : une veuve, de dos, se dirige vers la droite ; des hommes en noir circulent ou stationnent. Sur le bas-côté, en bas à droite, deux hommes : l’un est agenouillé, l’autre est effondré sur un banc. Le peintre les a ajoutés après avoir peint le décor, les choses certaines. L’homme sur le banc est assez substantiel, à peine si on devine derrière lui l’assise sur laquelle il est tassé, enveloppé de son manteau, endormi ou accablé ; celui à genoux est translucide, on voit l’autel et ses marches à travers lui. C’est un fantôme, saisissante image de nos vains repentirs et de nos résolutions qui ont si peu de substance.

Sacrée architecture ! La Passion d’un collectionneur. Musée de Flandre, Cassel (59). Jusqu’au 14 juin.

Illustration : Hendrik van Steenwijck II (Anvers, 1580 – Leyde, 1640). Intérieur d’une cathédrale gothique 35,5 x 52 cm – Huile sur cuivre

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